Levinas et les Soixante-Dix Nations (in lingua cinese)
Dans ce texte je me propose de sonder la limite ou l’illimité des frontières de cette expression – les Soixantes-dix Nations – utilisée par Emmanuel Levinas et les docteurs talmudiques auquel il se réfère, pour essayer de comprendre si cette locution peut être entendue et étendue universellement. Ainsi je m’interroge sur l’extensibilité et la traductibilité de la « difficile universalité » d’une fraternité humaine, renouvelée et inspirée par l’« humanisme de l’autre homme ». D’une part, il est important de se demander comment Levinas peut concilier dans sa propre pensée la tension de l’universalité de cet « humanisme » avec la singularité du message biblique, voire hébraïque, qui est à sa base ou qui en constitue en quelques sortes le fondement. En lisant de près le livre A l’heure des nations, je considère la relation entre la singularité de la source de ce message élaboré par Levinas et l’universalité d’une proposition philosophique qui pense cette universalité même autant difficile que nécessaire, en l’étendant jusqu’aux soixante-dix nations. D’autre part, je m’interroge sur le rapport singulier-universel, judaïsme-humanité tel que les pense Levinas, sur leur possible traduction, mais aussi, un peu plus complexement, sur leur spécifique universalité car j’y aperçois une contamination, ou bien une « dilatation » qui enfreint les limites de l’élection et de la révélation, censées être adressées à un seul peuple, pour s’ouvrir à une dimension universelle précisément, concernant l’humanité toute entière. Car la vocation singulière d’Israël – l’élection dans la responsabilité – constitue, selon les mots de Levinas, « les prémisses du miracle humain » comme tel. Mais comment cela est-il possible et envisageable ?