Quelle antériorité pour la philosophie première? Husserl et la fondation cartésienne de la phénoménologie

02 Pubblicazione su volume
Tommasi FRANCESCO VALERIO

Dans ce qu’on pourrait considérer comme sa première confrontation articulée avec l’histoire de la pensée, le cours du 1923-1924 consacré à la Erste Philosophie, Husserl présente la phénoménologie comme le résultat du long processus de recherche du fondement propre à la philosophie. Dans cette évolution, « ontogenèse » et « phylogenèse » phénoménologiques semblent procéder en parallèle : la réduction eidétique et la réduction transcendantale sont associées aux deux figures que Husserl décrit comme fondamentales, à savoir Platon et Descartes. Cependant, au moment où la « philosophie première » devient, à la suite de Kant, « philosophie transcendantale », le problème de la réduction éclate. La Kritische Ideengeschichte qui correspond à la première partie du texte et se conclut exactement avec le criticisme, laisse la place, dans la seconde partie, à une vaste Theorie der phänomenologischen Reduktion. Comme on le voit aussi dans la Krisis, le problème d’une lecture téléologique de l’histoire de la philosophie semble être en quelque sorte le symétrique de celui de la fondation d’une philosophie première sur un plan de pure certitude. Dans les deux cas – philosophie première et histoire de la philosophie – se produit une circularité paradoxale entre principe et fait, qui conduit à une multiplication incontrôlée des mouvements d’épochè et de réduction. Cela est ultérieurement confirmé par les Cartesianische Meditationen, où le problème de la fondation d’une philosophie première sur le fondement cartésienne et la difficulté d’atteindre une réduction définitive culminent dans la pluralité irréductible des ego. La circularité entre principe et fait semble d’ailleurs reprendre un trait fondamental de Descartes, mais déjà aussi de Platon, à savoir le dualisme. Est-il alors possible de penser une phénoménologie non dualiste ? De quelle façon peut-on, sans trahir la modernité, concevoir une philosophie première non cartésienne et non transcendantale ? On peut peut-être identifier un phénomène qui échappe au dualisme entre res cogitans et res extensa dans le corps : sujet d’une philosophie première comme archéologie, le corps, en tant que « point zéro » de toute constitution phénoménologique, semble être en même temps un plan plus empirique et plus transcendantal que la conscience.

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